Le Comité consultatif belge de bioéthique a émis un avis le 10 mai 2021 sur l’introduction d’un pass corona et d’autres mesures transitoires, en vue de rouvrir progressivement la société en toute sécurité.
Une nouvelle phase de l’épidémie nécessite la prise en compte d’éventuelles mesures de transition et d’assouplissement. Des mesures transitoires peuvent permettre une réouverture partielle de la société, tout en maintenant l’application de certaines mesures restrictives dans des lieux bien définis.
Le Comité considère que les mesures transitoires différenciées ne sont pas en elles-mêmes contraires aux principes juridiques de liberté et d’égalité, pour autant qu’elles soient proportionnées et fondées sur des critères objectifs. Le principe d’égalité n’empêche pas que des situations différentes soient traitées de manière inégale. La vaccination, l’immunité, mais aussi un test négatif récent peuvent temporairement créer des différences significatives dans le profil de risque, de sorte qu’une inégalité de traitement peut être légitime.
Cependant, d’importantes questions éthiques sont soulevées. Le Comité estime que les mesures différenciées ne sont acceptables d’un point de vue éthique et social que si un certain nombre de conditions sont remplies.
En voici les principales :
1. Lorsque les personnes vaccinées ne constituent plus un risque les unes pour les autres, elles peuvent se rencontrer sans devoir respecter davantage de règles (distanciation sociale et le port du masque). Cela devrait pouvoir s’appliquer en priorité à la sphère privée.
2. Parmi les mesures sanitaires qui s’appliquent dans le contexte privé, les autorités doivent définir celles qui n’apparaissent plus pertinentes pour les personnes vaccinées. Du point de vue humain, il faut aussi envisager dans quelle mesure les personnes vaccinées peuvent, dans une certaine mesure, également, avoir plus de contacts avec leur famille et leurs amis, éventuellement non vaccinés. Ce point peut aussi être partiellement subordonné au degré de circulation du virus dans la société, d’une part, et, d’autre part, au taux général de vaccination observé à un moment donné (sachant que ce taux est amené à augmenter au fur et à mesure de l’avancée de la campagne vaccinale).
3. Les autorités doivent examiner dans quelle mesure les personnes vaccinées peuvent être exemptées des mesures de dépistage et de quarantaine par exemple lors des voyages et du suivi des contacts (contact tracing).
4. Dans les collectivités (prisons, centres fedasil, maisons de repos et de soins, institutions psychiatriques, etc..), dès lors que la vaccination couvre une proportion suffisante de résidents et de personnel, des mesures d’assouplissement supplémentaires peuvent être prises pour les réunions ou contacts n’impliquant que les personnes faisant parties de la collectivité concernée. En revanche, pour les rencontres avec les visiteurs, les règles sanitaires devront être assouplies de la même manière que dans la société en général.
5. Si, dans le cadre de la réouverture progressive et sécurisée de la société, les autorités décident de permettre l’accès à certains services ou activités au moyen d’un « pass corona », il est impératif :
• que la loi définisse, dans leurs éléments essentiels ; les méthodes, les conditions et la durée de cette mise en place ;
• d’user de moyens qui évitent toute discrimination. Il faut offrir des moyens alternatifs gratuits et accessibles au seul statut vaccinal, en intégrant au « pass corona » les résultats de tests PCR ou antigéniques négatifs ainsi qu’un statut sérologique positif indiquant une infection passée ;
• que toutes les mesures juridiques et techniques nécessaires soient prises pour protéger la confidentialité des données personnelles sensibles et pour protéger le système contre la fraude ;
• qu’il s’agisse d’une mesure temporaire qui ne puisse être utilisée pour rendre la vaccination obligatoire de manière détournée ;
• que le gouvernement veille à ce que le Corona Pass, sous tous ses aspects, soit également accessible à tous, y compris aux personnes vulnérables ou victimes de la fracture numérique.
6. Le « pass corona », s’il est mis en œuvre, doit prioritairement s’appliquer aux voyages internationaux et aux événements impliquant des rassemblements collectifs importants et planifiés, où existent déjà des systèmes rigoureux de contrôle d’accès, mais où le respect des mesures sanitaires ne peut pas toujours être garanti.
7. L’utilisation d’un « pass corona » pour l’accès aux commerces d’alimentation, aux établissements d’enseignement obligatoire et aux hôpitaux pour les patients n’est pas acceptable. Dans ces cas-là, les autres mesures sanitaires doivent garantir la protection des usagers.
Source: d’’après l’avis n° 77 du Comité consultatif de Bioéthique de Belgique à consulter sur http://www.health.belgium.be/bioeth.
Avis Nr. 77 du 10 mai 2021 relatif aux considérations éthiques et sociétales liées à la mise en place d’un « pass corona » et d’autres mesures transitoires d’assouplissement des contraintes sanitaires: Conclusions et recommandations.